Nul ne pouvait se douter de la progression fulgurante de trois grands produits du monde provenant, dans bien des cas, de pays en voie de développement ou encore de pays qui ne peuvent suffire à la demande croissante du marché.
Il s’agit de la vanille, cette orchidée originaire du Mexique, du café et du cacao, dont les prix ont augmenté de 50 % en une année tellement la demande est forte.
Tahaa, qui signifie «l’île vanille» en polynésien, située juste à côté de l’île Raiatea, se voue depuis quelques années à la culture de la vanille dite «vanille de Tahiti». Un produit populaire autant pour la gastronomie en général que désormais pour l’industrie de la cosmétologie. On aime partout son parfum suave qui procure un arôme unique tant à la crème glacée qu’à la peau, dira madame Chane, la référence en la matière, maintes fois médaillée au concours agricole de Paris. Elle trie chaque jour ses gousses avec le plus grand soin avant de les expédier dans le monde entier.
Des produits presque banalisés
Durant de nombreuses années, le chocolat est demeuré un produit rare, presque inaccessible, réservé à une élite ou qui se limitait, pour bien du monde, à la traditionnelle tablette de chocolat. L’époque du chocolat chaud servi dans les grandes brasseries de Paris, de Rome ou de Genève a laissé place aux chocolatiers de renom qui traitent la fève devenue chocolat comme des orfèvres de l’art gourmand.
Le chocolat des années 2000 est plus que jamais un produit de luxe que le monde s’arrache. Drôle de paradoxe quand on pense que la cabosse de cacao provient de pays souvent pauvres ou vivant des conflits, tels le Mexique, le Pérou, l’Équateur ou la Côte d’Ivoire, une situation qui empêche bien des enfants d’y consommer le chocolat transformé.
Ces produits presque banals au quotidien sont devenus des sources importantes de revenus pour plusieurs pays en voie de développement et pourraient un jour changer le paysage agricole de territoires défavorisés en y favorisant le développement de nouvelles économies.
Le Brésil est un grand producteur de café, mais un joueur moins important en ce qui concerne le cacao, dont la première place revient à la Côte d’Ivoire.
Le cacao est cultivé principalement en Afrique de l’Ouest, en Amérique latine et en Asie. Les huit plus grands pays producteurs sont à présent, dans l’ordre décroissant, la Côte d’Ivoire, le Ghana, l’Indonésie, le Nigeria, le Cameroun, le Brésil, l’Équateur et la Malaisie. Ensemble, ils représentent 90 % de la production mondiale.
Source: Part des principaux pays producteurs de fèves de cacao (prévisions pour la campagne 2005-06), Secrétariat de la CNUCED d’après les données statistiques de l’Organisation internationale du cacao, bulletin trimestriel de statistiques du cacao.
Après l’eau, le café est la boisson la plus consommée dans le monde. Il est devenu un produit haut de gamme qui a largement dépassé le stade de «réveille-matin». Au Québec, on est passé en quelques années du café moulu ordinaire aux cafés d’origine, et surtout à l’ère de la machine espresso. Un phénomène de société qui place cet appareil au premier plan des cadeaux recherchés par les couples. L’augmentation des cafés et des lieux de torréfaction a accru l’intérêt pour le café, et particulièrement pour l’arabica, sur le continent nord-américain.
En Asie, qui montre un intérêt marqué pour les produits alimentaires de luxe, c’est le Japon qui demeure pour l’instant le premier client «chocolaté» du continent, en particulier avec la folie de la Saint-Valentin. La Chine, pour sa part, s’ouvre timidement au café, et surtout au chocolat, mais tous les spécialistes s’entendent pour dire que ce n’est qu’une question de temps avant que ces produits y soient aussi populaires. Si cela s’avère, aucune des productions actuelles ne sera suffisante pour combler les besoins des Chinois.
En accroissant sa présence en Afrique de l’Ouest, peut-être la Chine pense-t-elle aussi aux ressources agricoles et pas seulement à celles du pétrole ou autres du sous-sol?
Les changements climatiques inquiètent grandement les producteurs de vanille installés partout dans le Pacifique ou dans l’océan Indien. Les typhons, cyclones, tsunamis, ainsi que la montée probable des eaux dans certaines îles contribuent à l’augmentation du prix de la vanille. Que ce soit à Madagascar, à la Réunion, en Indonésie ou dans «l’île vanille» de Tahaa, rien ne garantit la production de cette orchidée de l’arôme.
En quelques décennies, les rôles se sont inversés, mais en contribuant toujours à enrichir les nombreuses sociétés bien implantées sur l’échiquier alimentaire mondial.
Le café, le cacao et la vanille équitables ne le sont souvent que sur papier, pas toujours dans la pratique, hélas.
Mais un nouveau joueur fait son entrée dans ce marché tant convoité; il s’agit de la Chine, où tout est possible.
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